Un point sur les prix

Comme vous avez pu l’entendre et le constater ces derniers mois, le prix des matières premières explose.
Le café, 2ème matière première la plus échangée dans le monde après le pétrole, ne fait pas exception.
J’adorerais pouvoir taper sur la tête des spéculateurs (ne serait-ce que parce que ça défoule) mais, au final, pour le café, ils ne viennent qu’amplifier la hauteur de la lame de fond qui va remodeler durablement ce secteur.

Pour le marché de base, l’augmentation est de plus 100%. Si les prix ne retombent pas, attendez-vous une augmentation du prix du paquet pour une qualité significativement en baisse. Quelque chose me dit que les grandes marques vont trouver des slogans extraordinaires pour vous vendre du Robusta (plus de 60% moins cher que l’arabica) et que la majorité des cafés de restaurant vont voir leur %age de Robusta passer de 10/20% à plus de 30… Vous aviez déjà du mal avec ce vague jus noir au prix indécent, vous n’allez plus pouvoir y toucher !

Je pourrais très bien arrêter là mon article et ricaner bêtement sur le sort de ces torréfacteurs et restaurateurs mais il s’avère que ce mouvement crée aussi des remous au niveau du « speciality market », le « marché de spécialité », les « grands crus »… Enfin le bon café quoi…
L’impact n’est bien pas aussi énorme que sur le marché de base (plutôt de l’ordre de 15 à 30%) mais il est là et nettement plus clair à analyser.

Les principaux facteurs sont les suivants :

– Des aléas climatiques contribuent à une baisse naturelle de la productivité des plants accentuée par une augmentation d’attaques d’insectes et maladies. Les prévisions de récolte vont jouer de manière très significative dans la variation du prix sur le marché à terme. Jusque dans le milieu des années 70, c’était LE facteur déterminant. Depuis, avec la dérégulation, la spéculation financière a pris le dessus, a amplifié ce phénomène et en a ajouté d’autres, ce qui rend le marché illisible et encore plus nerveux (joli exemple de cercle vicieux).

– L’augmentation de la consommation de café. Par exemple, le Brésil consomme aujourd’hui quasiment la moitié de sa production, c’était moins de 10% il n’y a pas si longtemps… Et il en va de même de tous les pays que l’on aurait tendance à appeler émergeant mais qui, niveau café, ont bien émergé. La quantité globale de café disponible n’augmentant pas, la loi de l’offre et de la demande pousse les prix à la hausse.

– L’apparition d’une vraie culture café dans les pays développés, d’où un engouement toujours plus important vers des cafés de qualité. Et cela, je le constate tous les jours. Quand on a gouté à ces cafés, on ne revient pas en arrière, que l’on habite le 1er arrondissement de Paris, Souffelweyersheim ou Caouënnec-Lanvézéac (promis, je ne les ai pas inventés :)). Le café de qualité demandant un réel engagement, un terroir et une connaissance de la culture et des méthode des séchage, la quantité disponible n’augmente que doucement, bien moins rapidement que la demande, pas besoin de vous faire un dessin de l’impact sur le prix…

– La fin de l’énergie peu chère (gaz et du pétrole). Non, le café ne se dématérialise pas au Brésil pour réapparaitre dans mon garage et il ne passe pas de l’état vert à torréfié par l’opération du Saint-Esprit (de tout façon, il ne connait pas mes courbes de T°, alors je n’aurais pas confiance).

– La généralisation des méthodes de protection des grains. Ils permettent de maintenir la fraicheur des grains. Que ce soit avec les Penta Box de Daterra ou les Grain Pro chez d’autres, la différence est majeure mais elle a un coût additionnel non négligeable.

Mais alors cette augmentation, un bien ou un mal ?

Un bien pour les producteurs qui profitent aujourd’hui de prix dont ils ne pouvaient que rêver il y a quelques saisons, qui leur permettent d’investir dans des équipements plus perfectionnés afin d’encore augmenter la quantité et la qualité dans leur production.
Un mal (relatif) pour nous qui devons débourser plus pour l’importer, le transformer et le consommer. Je relativise parce qu’une tasse d’espresso pour un paquet à 6 euros, ce n’est jamais que 17 centimes.

Et au final quel impact sur le porte monnaie ?

Difficile de répondre de manière générale mais dans le cas de Caffè Cataldi, et hors Cup of Excellence, qui sont des exceptions fonctionnant sur le principe des enchères, alors qu’au lancement la gamme des prix allait de 4,50 à 6 euros avec une majorité à 5/5,50 euros, elle est désormais de 5 à 7 euros avec un équilibre actuel à 5,50 euros penchant de plus en plus vers les 6 euros. Cependant, en parallèle, grâce à la généralisation des Penta Box et autres Grain Pro, la qualité gustative des produits s’est aussi nettement améliorée. Je considère donc pour l’instant que le rapport qualité/prix est quasiment inchangé, ce qui reste pour moi, l’indice déterminant. Mais soyez simplement sûrs d’une chose, ici, l’arnaque n’a pas de place à table et qu’être le plus riche dans la tombe m’intéresse assez peu (certains avaient-ils encore un doute ?). Donc, si par je ne sais quel événement, les prix venaient à baisser, ce serait répercuté lors de la mise en place des nouveaux cafés (ma feuille excel de calcul de marge fonctionne bien et je suis trop flemmard pour la modifier).

Et pour terminer et vous démontrer que de toute façon, vous n’avez pas le choix, j’ai demandé à un ami, Sauron, qui habite une très jolie tour, de conclure pour moi.

Un Café pour les gouverner tous. Un Café pour les trouver. Un Café pour les amener tous et dans les torréfactions les lier.